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Diplomatie

RDC-Rwanda : Mukwege met en garde contre un accord de paix « opaque » et légitimant l’agression

Alors que les gouvernements de la République Démocratique du Congo et du Rwanda s'apprêtent à signer un accord de paix sous l'égide des États-Unis, la voix du Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix, résonne avec force pour alerter sur les dangers d’un processus mené sans transparence ni justice. Pour lui, ce rapprochement entre Kinshasa et Kigali, présenté comme un pas vers la paix, risque de masquer des enjeux fondamentaux, notamment la reconnaissance de l’agression rwandaise et le pillage continu des ressources congolaises.

Mukwege critique vigoureusement le processus ayant conduit à l’élaboration de l’accord, qu’il qualifie d’« opaque et non inclusif », craignant qu’il n’avantage principalement le Rwanda, acteur accusé d’agression et jamais sanctionné. Il estime qu’une telle démarche reviendrait à « blanchir » les crimes passés et présents en les maquillant sous une prétendue coopération économique, sacrifiant ainsi la justice sur l’autel d’une paix illusoire. Le médecin de Panzi avertit qu’un accord sans reconnaissance claire des torts ne saurait garantir la stabilité durable.

Au cœur de sa dénonciation se trouve le non-respect de la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui exigeait notamment le retrait immédiat des troupes rwandaises du territoire congolais et la fin du soutien au M23. Mukwege fustige une déclaration conjointe qui passe sous silence ces exigences fondamentales du droit international. Pour lui, aucune paix véritable ne peut être construite en ignorant les prescrits internationaux et en fermant les yeux sur les violations flagrantes.

Mukwege plaide en faveur d’un processus réellement inclusif, intégrant les voix des femmes, des jeunes et des communautés victimes de l’Est du pays. Il rappelle que les souffrances endurées, massacres, viols, déplacements massifs, ne peuvent être balayées sous un accord technocratique aux allures extractivistes. Une coopération économique avec un « État agresseur » est, selon lui, moralement inacceptable tant qu’aucune justice ni réparation n’est envisagée.

Enfin, le célèbre gynécologue insiste sur l’importance de la justice transitionnelle pour espérer une paix durable dans les Grands Lacs. À ses yeux, la réconciliation ne peut reposer sur le silence, mais sur la vérité, la mémoire des victimes et des mécanismes clairs de justice. Il appelle donc à une refondation du processus de paix, centrée non sur le business et la géopolitique, mais sur le droit, la dignité humaine et le respect des principes fondamentaux de la souveraineté congolaise.

Adolphe Plamedi MUZAMA