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Politique

Retrait de la SAMIDRC par le Rwanda : un geste révélateur au cœur d'une diplomatie en mutation (Tribune)

La scène aurait pu paraître banale si elle ne portait en elle les marques d’un bouleversement régional. Ce mardi 29 avril, les troupes de la Mission de la Communauté de développement d’Afrique australe en République démocratique du Congo (SAMIDRC) ont quitté Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, par voie terrestre via « La Grande Barrière », à la frontière avec le Rwanda. L’image de ce convoi militaire, salué du regard par une population impuissante, illustre bien plus qu’un simple redéploiement : elle révèle les fractures et les tentatives de recomposition sécuritaire dans la région des Grands Lacs.

Déployées depuis décembre 2023 pour soutenir les FARDC dans leur combat contre les groupes armés, les forces de la SAMIDRC s’étaient retrouvées confinées à Goma depuis la prise de la ville par les rebelles de l’AFC-M23, fin janvier 2025. Leur départ marque non seulement la fin d’une mission qui n’a jamais réellement pu entrer en action, mais aussi un paradoxe géopolitique : c’est par le territoire rwandais, pays accusé de soutenir les rebelles, que ces troupes quittent la RDC, avec l’aval de Kigali.

Un retrait sous escorte rwandaise, en plein ballet diplomatique

Le retrait des contingents de la SADC survient alors que la scène diplomatique congolaise connaît une intense activité. En l’espace de quelques jours, le président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló, porteur d’un message de paix au nom de la CEDEAO, et Maxime Prévot, le Chef de la diplomatie belge, ont foulé le sol congolais. Ces visites s’inscrivent dans une dynamique nouvelle, où les acteurs africains et européens tentent de construire un dialogue régional et de raviver les perspectives de coopération multilatérale pour la stabilité à l’Est de la RDC.

Ces gestes diplomatiques, bien qu'encourageants, se heurtent à une réalité de terrain où les rapports de force restent dominés par des acteurs non étatiques armés, soutenus en sous-main par des puissances régionales. Le départ de la SAMIDRC par le Rwanda soulève des interrogations légitimes : s’agit-il d’un simple transit logistique ou d’un message politique masqué ? Kigali, en facilitant ce passage, chercherait-elle à redorer son image dans un contexte de tensions persistantes avec Kinshasa ?

Vers une nouvelle architecture de sécurité ?

Le vide laissé par la SAMIDRC remet en question l’efficacité des mécanismes régionaux actuels face à la complexité du conflit congolais. Alors que les initiatives africaines se multiplient, du Processus de Luanda aux discussions de Nairobi, les récents événements rappellent l'urgence d’une stratégie coordonnée, intégrée, et surtout inclusive.

La présence accrue de diplomates étrangers pourrait marquer le début d’un tournant. Mais pour que la paix ne reste pas un mirage, il faudra plus que des gestes symboliques : un engagement réel pour le désarmement des groupes rebelles, la fin des ingérences régionales, et la restauration de la souveraineté congolaise sur tout son territoire.

Le retrait des troupes de la SADC par le Rwanda n’est pas un simple fait logistique ; c’est un symptôme d’une crise plus profonde, mais aussi peut-être le point de départ d’un sursaut diplomatique. Entre efforts de paix et réalités de guerre, la RDC continue de marcher sur un fil tendu. Les prochains mois seront décisifs.

Plamedi MUZAMA