Dans un silence assourdissant, sans qu’aucun coup de feu ne soit tiré, la chefferie de Luhwinja, située dans le territoire de Mwenga, est tombée aux mains du M23 dans la soirée du 6 mai. Cette avancée sans résistance marque un tournant majeur dans l’expansion de la coalition rebelle AFC/M23 dans le Sud-Kivu, quelques mois seulement après leur entrée fracassante dans Bukavu le 14 février.
Luhwinja, plus qu’une simple entité administrative, est un territoire convoité en raison de ses abondants gisements d’or. La chute de cette chefferie ne saurait être lue uniquement comme une défaite militaire, mais plutôt comme une manœuvre tactique de grande envergure. Sans rencontrer d’obstacle, les rebelles y ont pénétré, affirmant leur mainmise sur une zone dont le sous-sol regorge de minerais convoités sur le marché international.
Cette prise intervient dans un contexte déjà fragilisé : une semaine auparavant, Kaziba, autre bastion stratégique, avait été le théâtre d’affrontements acharnés entre les rebelles et la coalition FARDC–Wazalendo. Malgré près de deux jours de résistance acharnée, les rebelles avaient fini par s’imposer. L’arrivée du M23 à Luhwinja sans combat témoigne peut-être d’un épuisement des lignes de défense ou d’un repli stratégique orchestré.
Le phénomène s’étend : les groupements de Luchiga, Kabalole, Luduha et Idudwe sont désormais sous le joug rebelle. Là encore, les forces du M23 ont choisi l’efficacité à la confrontation directe, contournant méthodiquement les localités de Ngando, Chihumba et Kashanga avant de fondre sur ces positions riches en or. Leur progression méthodique semble suivre une logique économique plus que militaire.
L’inquiétude monte à Twangiza, site minier industriel à forte valeur stratégique. À moins de cinq kilomètres de Luchiga, cette infrastructure, jadis fleuron de l’exploitation aurifère sous Banro Corporation et aujourd’hui détenue par des intérêts chinois, devient une cible imminente. Sa prise pourrait offrir au M23 non seulement une victoire symbolique, mais un levier financier considérable.
La chute de Luhwinja révèle l’ampleur d’une stratégie de contrôle territorial fondée sur la captation des ressources minières. Elle interroge également sur la résilience des forces loyalistes et la portée réelle de la présence de l’État dans ces zones périphériques. Le silence des armes, cette fois, n’a pas signifié la paix, mais l’effondrement sans résistance d’une portion du territoire congolais aux ambitions rebelles.
La Rédaction