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Nord-Kivu : La chute de Lunyasenge, une nouvelle brèche ouverte par l’AFC/M23 vers le Grand Nord

Depuis le 2 mai, la localité stratégique de Lunyasenge, nichée sur la rive ouest du lac Édouard en territoire de Lubero, est tombée aux mains des rebelles de l’AFC/M23, appuyés par des unités de l’armée rwandaise. Ce nouveau front illustre l’expansion progressive du mouvement rebelle vers le nord, en direction de Kyavinyonge, Butembo et, à terme, Beni. Une dynamique inquiétante pour les autorités congolaises, qui dénoncent une violation flagrante du cessez-le-feu et menacent de riposter.

Les témoignages recueillis sur le terrain font état de violents affrontements entre l’armée congolaise et les rebelles, sans qu’un bilan humain précis ne puisse être confirmé. Toutefois, des images circulant sur les réseaux sociaux montrent des soldats congolais tués, révélant l’intensité des combats. Les rebelles auraient avancé à la fois par voie terrestre et lacustre, depuis les pêcheries déjà conquises de Vitshumbi et Kamandi-Gîte.

Lunyasenge, bien plus qu’un simple village, représente une porte d’entrée vers le nord du Nord-Kivu. Elle est située à quelques heures de navigation de Kyavinyonge, un centre névralgique pour l’économie locale et un carrefour vers Butembo, Beni et la frontière ougandaise. Sa prise fragilise toute la façade ouest du lac Édouard et expose désormais les localités voisines à de nouvelles incursions.

Face à cette avancée, les mouvements de population se multiplient. Les habitants de Musenda, Kisaka et d’autres localités fuient vers Kyavinyonge, Mubana et même Kasindi, à la frontière avec l’Ouganda. Kyavinyonge accueille déjà des centaines de déplacés, hébergés tant bien que mal dans des églises et des familles.

Outre les conséquences sécuritaires, la chute de Lunyasenge aggrave une crise économique locale déjà précaire. Les activités de pêche, pilier de la subsistance dans la région, sont paralysées. Les pêcheurs n’osent plus s’aventurer au-delà de Kyavinyonge, et le poisson se fait rare. Certains n’ont d’autre choix que de braver les eaux ougandaises, au risque de représailles : en trois mois, plus de 70 pêcheurs ont été arrêtés et 200 moteurs de pirogues confisqués par la marine ougandaise.

L’impact ne s’arrête pas à la pêche. Les produits agricoles, notamment les cossettes de manioc en provenance de Vitshumbi, ne parviennent plus jusqu’au Grand-Nord, provoquant une hausse des prix et une insécurité alimentaire rampante.

L’offensive de l’AFC/M23 dans cette zone sensible inquiète autant qu’elle interroge. Elle met en évidence les limites du cessez-le-feu négocié à l’international et soulève des doutes sur l’efficacité des processus en cours à Doha et Washington. Pour la population locale, c’est avant tout une urgence humanitaire et sécuritaire qui s’installe, tandis que la menace rebelle semble désormais viser les portes du Grand-Nord congolais.

La Rédaction